mardi 15 septembre 2009

LA PARISIENNE


Lorsqu’une parisienne court le long de la côte sauvage, une autre participe aux
6 km les plus surpeuplés de l’année !

Il est 8h du matin, parce que c’est la bonne heure pour comprendre la sensation d’être seule au monde en Bretagne et pour soutenir psychologiquement celles qui s’échauffent avant leur course féminine à Paris.
C’est le mois de septembre, les touristes ne sont plus sur la côte Atlantique et le soleil qu’ils n’ont pas eu, est là ! Des conditions optimales.
Elle s’élance dans sa course, heureuse de faire partie de ce cadre-là.
Paris - les bords de seine – le jardin des Tuileries – du Luxembourg – les canaux – c’est bien et même très beau, mais ça ne vaut pas tant de splendeurs : les vagues qui frôlent la roche, les couleurs argentées du sable, les embruns sur sa peau, les cris des mouettes en fond sonore. La mer est calme – les goélands se retournent perplexes sur son passage. Elle contourne les pierres polies qui risquent de la faire trébucher. Elle foule le sentier d’un pas léger- sable – cailloux – terre – racines – pas le temps de s’ennuyer.
Ses yeux qui balayent la mer, les chemins sinueux au loin et ses pieds. Une tâche rouge avance vers elle. Probablement un k-way, même s’il ne pleut pas, parce qu’en Bretagne on maîtrise l’humidité. C’est un autre coureur qui a eu la même idée qu’elle ce matin. Elle ose :
- Bonjour !
Elle imagine qu’elle aura plus de chance qu’à Paris.
- …
Mais seule la nature est aimable, lui offrant un sourire gracieux, sans échange à la clé.
Les parisiennes courent toujours : l’une face à l’atlantique, l’autre face à la seine. Tout les sépare en ce moment : calme/excitation, solitude/foultitude, claquement de vagues/claquements de mains, 1 personne croisée/17 000 femmes !
Celle qui court en Bretagne lutte contre le vent, contrarie sa respiration. Trop d’air avalé, c’est le point de côté assuré. Un banc au bord de la falaise pour s’étirer et comprendre pourquoi elle respire aussi mal. La côte sauvage est aussi belle qu’elle est asphyxiante. C’est trop d’air pour une parisienne qui a l’entraînement d’une citadine.
Pendant ce temps, celle qui court à Paris joue des coudes, lutte pour éviter les milliers de talons qui l’entourent, excitée par la foule et l’ambiance, elle trouve juste assez d’air pour courir sereinement.
Mais ce matin tout est différent pour la parisienne qui choisit les sentiers maritimes au lieu de l’asphalte ; il n’est pas question de chrono, ni de distance, pour une fois il s’agit d’une histoire entre la nature, elle et le plaisir.
Des sensations que l’on pourrait perdre de vue à force d’être parisienne.

P.S : je suis heureuse de constater que « les grands » trouvent à écrire sur cette discipline extraordinaire qu’est la course à pieds. Je ne sais pas vous, mais le livre du Japonais Haruki Murakami m’intrigue… Qui a lu « Autoportrait de l’auteur en coureur de fond » ?